Avec Le deuil humain, qui obtint en 1943 le Prix national de littérature, le Mexicain José Revueltas a donné une contribution exemplaire à ce que l'histoire littéraire ne tarderait pas à désigner comme le trait caractérisant le roman sud-américain : le réalisme halluciné.
Le thème du roman, c'est la lutte sans pitié que se livrèrent, au lendemain de la révolution de 1910, les paysans du Mexique, divisés en partisans du Christ-Roi, soutenus par les forces conservatrices du pouvoir, et en révolutionnaires, anciens soldats de Pancho Villa et de Zapata. La région où l'histoire se déroule est celle, d'une pauvreté extrême, que les agriculteurs désertent, menacés tour à tour par la sécheresse et les crues dévastatrices du fleuve qui la traverse. C'est ce dernier bouleversement qui intervient lorsque meurt la petite fille d'un couple de paysans et qu'il s'agit d'aller chercher le curé sur l'autre rive du fleuve...
Les eaux n'ayant cessé de monter pendant la veillée funèbre, voilà les personnages du roman, anciens amis ou ennemis dans la lutte révolutionnaire, réfugiés sur le toit de la maison, tandis que les zopilotes – des vautours – attendent le moment de les dévorer. Alors, déjà comme en marge du temps, chacun se remémore les instants les plus brûlants de sa vie. Et, page après page, ils deviennent les figures d'une tragédie archaïque où sont en jeu la faim, la vengeance, le passé du Mexique, et les questions primordiales de la condition humaine : Pourquoi lutter? Pour quelle justice? À quelle fin?