Du fait divers sordide aux phénomènes d’assassinats horribles de femmes à Ciudad Juárez ; des populations locales inféodées et alimentées par l’industrie du crime aux « livraisons », pratiquement hebdomadaires, de décapités et de leurs cortèges de dépouilles inidentifiables ; de l’image du dépotoir, associé aux ferments de la reproduction du rebut social, à la spectaculaire Tijuana qui écrase, dans son obésité de « Las Vegas bon marché » et de consommation à outrance, les droits de l’ouvrière de la sous-traitance…
C’est dans cet environnement intense de corps comme lieux privilégiés des bourreaux et de corps faits de résistances, que se réalise l’étude intitulée Scènes et corps de la cruelle démesure : Récits de cet insoutenable Mexique ; et ce depuis une parole littéraire et un discours iconographique qui se penchent sur ce qui se montre et ce que l’on nous montre à propos de ces formes humaines altérées par un climat et une géographie socialement hostiles.
Ce travail, qui part du principe de lire le monde à travers la parole artistique, se propose d’analyser comment l’écriture et l’image s’approprient, défont, reconstruisent, déforment des événements de la dissymétrie qui ont ponctué et ponctuent des histoires humaines du Mexique du xxe et xxie siècles, et qui souvent condamnent ces dernières, dans un contexte politique où la Loi et la Justice sont sous le joug de l’impunité, à la mutilation, au silence et à la disparition.